L'indésirable - Sarah Waters
Edition : Denoël
Parution : Août 2010 (Octobre 2011 pour 10X18)
Au hasard d'une urgence, Faraday, médecin de campagne, pénètre dans la propriété délabrée qui a jadis hanté ses rêves d'enfant : il y découvre une famille aux abois, loin des fastes de l'avant-guerre. Mrs Ayres, la mère, s'efforce de maintenir les apparences malgré la débâcle pour mieux cacher le chagrin qui la ronge depuis la mort de sa fille aînée. Roderick, le fils, a été grièvement blessé pendant la guerre et tente au prix de sa santé de sauver ce qui peut encore l'être. Caroline, enfin, est une jeune femme étonnante d'indépendance et de force intérieure. Touché par l'isolement qui frappe la famille et le domaine, Faraday passe de plus en plus de temps à Hundreds. Au fil de ses visites, des événements étranges se succèdent : le chien des Ayres, un animal d'ordinaire docile, provoque un grave accident, la chambre de Roderick prend feu en pleine nuit, et bientôt d'étranges graffitis parsèment les murs de la vieille demeure. Se pourrait-il qu'Hundreds Hall abrite quelque autre occupant ? Dans ce roman à tiroirs, Sarah Waters revisite avec le talent qu'on lui connaît les codes des classiques anglais, d'Henry James à Edgar Allan Poe.
"L'indésirable" est avant tout un roman d'ambiance. Ambiance un peu surrannée des charmes d'antan dans lesquels le lecteur se love et se délecte comme dans un bon roman du XIXème.
Le fil conducteur de ce récit est Hundreds Hall, une demeure imposante située dans le Warwickshire, en Angleterre. Au temps de sa splendeur, elle s'élevait, magnifique et fière, entourée de fermes et autres dépendances, grouillante de domesticité.
Les temps ont changé, le guerre a presque ruiné ses habitants - désormais réduits à 3 plus une seule domestique - tentent de garder la tête haute, de faire bonne figure, de sauvegarder les apparences que leur imposent leur classe et leur éducation. Mais Hundreds Hall reste le maître incontesté des lieux, s'imposant subepticement dans leurs actes comme dans leurs esprits et leurs inconscients ; tirant en coulisse les ficelles des souvenirs et des fastes d'antan, comme s'il était un être vivant.
De la splendeur passée, il ne reste pourtant que la carcasse délabrée de cette auguste demeure.
"Ce qui me fit frissonner, ce furent les traces de décrépitude. Des morceaux entiers des délicates pierres d'angle patinées semblaient être tombés, de sorte que la silhouette géorgienne, un peu floue, de la maison semblait encore plus imprécise qu'auparavant. Du lierre avait poussé, puis était mort, et pendait par plaques comme des poils de queue de rat emmêlés. Les marches menant à la grande porte principale étaient fendues, et la mauvaise herbe poussait à loisir par les interstices."
Quant au Docteur Faraday, il est littéralement obnubilé et subjugué par cette maison, amoureux d'elle depuis son enfance.
Dans cette atmosphère particulière et étrange, le lecteur avance avidement tout au long des 700 pages de ce roman magnifiquement écrit.
Hundreds Hall laissera-t-il le Dr Faraday, Caroline, Roderick ou Mrs Ayres lui restituer son ancien charme ? Sacrifieront-ils les apprences pour sauver leur famille ?
Et la demeure le permettra-t-elle ?
La lecture de ce titre entre dans le cadre du challenge des 12 d'Ys, catégorie n°4 "pavés".